Laurence Gossart a d’abord observé et représenté les végétaux dans des séries de dessins aux crayons de couleurs où se révélaient déjà la prolifération des feuillages. De la mémoire de ces formes, elle a développé une ligne fluide, qu’elle fait cheminer sur la feuille. Les différents formats et supports qu’elle utilise lui offrent l’opportunité d’explorer diverses relations à l’espace, de la condensation de traits, nœuds, noyau à l’expansion, à la fuite.
Invitée par Viviane Zenner (galerie des Jours de Lune) à exposer dans le cloître des Récollets, elle y trouve un lieu pour cristalliser son intérêt pour la Botanique. Laurence Gossart a pris soin d’étudier par le dessin, les racines et la fleur de diverses espèces d’Iris. Avec la complicité de sa galeriste messine, elle a investi la salle de lecture des Archives de Metz avec un ensemble de dessins qui invitent à un parcours du regard pour saisir tel un chercheur l’extraordinaire richesse des espèces de cette plante. Au fur et à mesure qu’elle y prêtait attention, elle laissait son esprit s’ouvrir à ce que lui offraient ces Iris. Après un passage par le jardin médiéval, le visiteur est déjà mis au parfum d’une méditation botanique.
Elle a réalisé une série de petits formats de dessins de cette fleur délicate, plus ou moins ouverte. Sur une étagère, ils sollicitent le regard des plus curieux qui découvrent ainsi les différentes étapes d’éclosion.
Des grands dessins présentent une grande douceur, le velouté des pétales de cette fleur délicate, fragile. On les découvre comme si l’on parcourait un jardin. Ces portraits d'Iris nous renvoient à l’échelle humaine. Notre rapport à la plante bascule du détail à l’abstraction, à des formes, souvenirs de cueillettes et de sensations.
D’autres dessins sont mis en relation avec des planches botaniques et révèlent l’observation fine de l’artiste, sa rencontre avec quatre gravures de la boite d’iconographie des Iris de la bibliothèque de botanique du Muséum d’Histoire Naturelle de Paris. Elle a passé du temps à les contempler pour en saisir tous les détails et la place du végétal dans la feuille de leur auteur Pierre-Joseph Buc’hoz.
Une vitrine contient des livres dessinés où Laurence Gossart a pris soin de faire circuler ses dessins de pages en pages. Une autre renferme des dessins, ses Pensées sur papiers Roma, gris. Elle fait circuler ses lignes qui dessinent des entrelacements qui font écho à des lianes, fils qui se déploient, en croissance. Ces réseaux se concentrent parfois, se nouent et forment une structure à la fois souple et fluide.
Sur les murs, Forms of Memories, de grands dessins réalisés sur Vélin Arches montrent le passage du temps. Les lignes fluides se concentrent pour former des pétales, des lianes ou une chevelure. Son trait, dans un rythme de dessin quotidien, témoigne du passage du temps, d’une méditation par la concentration sur le papier. D’ailleurs, des écrits ponctuent ses dessins. La feuille de papier est espace de circulation, de développement de ses lignes. Elles s’entremêlent, se concentrent, parfois, elles s’étendent, s’étirent. Laurence Gossart révèle un processus de croissance. Ses dessins suggèrent également des sensations, des émotions, la construction d’un fil de pensée ou de surgissement de souvenirs.
Pour elle, les racines sont des éléments riches de sens, sujet de représentation et de réflexion dans sa pratique du dessin. Ici, elle présente une série de petits formats qui nécessitent une attention aiguisée pour percevoir la précision des détails de cet élément tortueux. Comme en suspens dans la feuille du papier, il suggère sa croissance.
Cette exposition est également un hommage au botaniste et écologue Jean-Marie Pelt, dont l’Institut européen d’écologie qu’il a fondé jouxte ce lieu d’archives et d’études.
Laurence Gossart révèle la composition, l’intérieur et l’extérieur de la plante. Art et botanique se rejoignent ici. De la plante, elle fait aussi surgir ce qui est souterrain, un système racinaire fascinant. Elle nous invite à prêter attention au végétal, à ces différents stades de développement. Du détail de la structure de l’Iris dans des petits formats, dissimulés, à des agrandissements de pétales, l’artiste nous convie à une exploration du vivant.
Pauline Lisowski
Une exposition à découvrir absolument jusqu'au 29 mars
Un hors les murs proposé par la galerie Des jours de Lune
Cloître des Récollets, 1, rue des Récollets, 57000 Metz
03 87 68 25 70