Bettie Nin élabore des "passages" entre les questions de la frontière matérielle et celles du tracé dessiné et de l'infini. Elle explore les liens entre les espaces réels, les repères géographiques et politiques, les perceptions et sensations propres à chacun. D'où son exposition à la galerie Perception Park, où elle invite le spectateur à faire l'expérience de sa "Rose des vents extrudée" : véritable passage qui ouvre de multiples directions, choix de regards et de fuites sur les côtés, mais également vers une vision d'un espace ouvert, infini. À l'intérieur d'une cabine à la fois multiples ouvertures et fermetures, le spectateur peut ressentir un trouble visuel et spatial qui lui fait oublier les limites et les frontières. À travers les différentes portes qui matérialisent les points cardinaux, le spectateur prend conscience d'une traversée, d'un déplacement. Si Bettie Nin prend pour sujet la rose des vents, elle la dérive de son sens premier car ici ce point de repère empêche toute localisation. Être à l'intérieur appelle l'extérieur mais aussi le désir d'un entre, d'une possibilité d'être dans un lieu non localisé, non situé.
En parfait écho, sa série des photogrammes révèle les mêmes préoccupations. Ses œuvres se lisent dans un double sens selon la densité de blanc et de noir. Chaque forme noire renvoie à une ligne, une frontière ou à une forme posée sur un fond sensible à un flux. Le plan noir peut être aussi perçu comme un espace en profondeur. Dans ses œuvres, la transparence et l'opacité renvoient au miroir et à la matière brute du bois des installations. En équilibre et face à la fenêtre de la galerie, l'installation "Espace topologique" crée un effet de mise en abîme qui joue entre extérieur et intérieur, cloisonnement et ouverture.
Milovann Yanatchkov, architecte de formation, répond aux œuvres de l'artiste avec des projets numériques. À la notion d'infini et d'illusion optique, il ajoute celle de temporalité. À partir d'un logiciel dont il est lui-même l'auteur, il a conçu un ensemble d’œuvres qui jouent sur nos perceptions. Le processus informatique froid prend, dans ce projet, une dimension plus sensible : le curseur matérialise la main de l'artiste. La présence humaine apparait donc au travers de cette temporalité bien réelle. Du code informatique, des données à l'écran deviennent des moteurs de trajectoires allant jusqu'à une multiplicité des lignes et au brouillage. Sur image numérique, des vaisseaux convergent vers un point, une origine, pour créer une véritable captation d'un mouvement virtuel. Ainsi, d'un procédé informatique, il en découle une image abstraite, quasiment picturale. Celle-ci fait éprouver au spectateur un trouble de la perception. Ce qui intéresse l'artiste c'est de révéler l'effet de chaos visuel produit par l'animation. De la manipulation du numérique, Milovann Yanatchkov réussi à produire une nouvelle énergie créatrice. Ses œuvres renvoient vers un infini, un abîme, qui entre en parfaite relation avec celles de Bettie Nin.
Le terme "Passage" est ainsi compris dans ses sens multiples : passage comme frontière, limite, ouverture mais aussi comme transformation, changement d'état.
"Passages", des oeuvres de Bettie Nin et de Milovann Yanatchkov, à découvrir jusqu'au 21 décembre à la galerie Perception Park, Paris
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