Prolongation de l’exposition L’ange du bizarre, Le romantisme noir de Goya à Max Ernst, au musée d’Orsay, Paris



Prolongation de l'exposition L'ange du bizarre, Le romantisme noir de Goya à Max Ernst, au musée d'Orsay, Paris

Au musée d'Orsay, un voile de noir, d'imagination et de frisson a couvert les salles d'exposition temporaire. L'exposition L'ange du bizarre retrace, pour la première fois, l'histoire d'un courant artistique qui traverse aussi bien la peinture, la sculpture et les arts graphiques du XIXe au début du XXe siècle. Elle met en avant les thématiques de l'horreur et du trouble qui surgissent à travers des représentations qui ont aujourd'hui inspiré l'imaginaire fantastique. Mais, cet attrait pour le noir et pour ce qui fait peur relève plus d'une certaine forme de liberté par rapport au goût de l'époque. Le parcours, découpé en trois époques, fait comprendre comment le courant du romantisme noir s'est développé, sous quelles formes et dans quelles circonstances. Il débute de 1770 à 1850 avec plusieurs mutations historiques. De 1860 à 1900, on le redécouvre dans l'art symbolique. La dernière partie est consacrée à l'art surréaliste. Pour témoigner des répercussions de ce courant sur l'imaginaire collectif, plusieurs grands classiques du cinéma d'horreur sont projetés.

Dès l'entrée de l'exposition, nous sommes plongés dans le noir avec le film "Nosferatu Le Vampire" de Murnau. On commence à découvrir les premières oeuvres qui témoignent d'un imaginaire lié à la peur avec la représentation de paysage onirique peuplé de monstres et notamment de la figure de Satan. Le cauchemar apparait comme le thème privilégié de Fussli, peintre dit romantique. La littérature et les mythes étaient des sources d'inspiration pour les artistes, comme la Divine Comédie de Dante, Faust. On peut découvrir les dessins très sombres de Delacroix, des aquarelles du peintre Louis Boulanger Les Fantômes, des petits dessins de Victor Hugo. Puis le fil conducteur de l'exposition nous amène à comprendre les pertes de repères de la société de l'époque. Les gravures de Goya montrent une violence noire. Les désastres des guerres ont incité les artistes à témoigner de l'atrocité de la barbarie humaine. Dans la salle suivante, les peintures de paysages des peintres romantiques français et allemands nous laissent notre imaginaire plus au calme des tumultes. Les lieux représentés sont des forêts réelles, des paysages de ruines. Dans l'oeuvre de Moritz von Scwind, les figures imaginaires apparaissent comme des lumières dans la forêt. L'oeuvre de Thomas Ender, elle, représente un paysage de catastrophe à la fois calme et déchainé. Le château est vu comme l'élément propice à l'invention de paysages étranges et noirs grâce à Victor Hugo. Les intensités lumineuses et les contrastes très forts permettent de renforcer à un certain côté dramatique dans les paysages de Carl Gustav Carus.

A la suite de ce premier parcours de paysages et des personnages sombres, on découvre des oeuvres du mouvement symboliste. Les artistes de ce courant se sont retrouvés libres de représenter certaines figures mythiques comme la Méduse, figure féminine de l'effroi. D'autres figures féminines sont sujets des artistes tels que Gustave Moreau, Paul Elie Ranson et d'autres. On peut apprécier également la présence de quelques oeuvres de Munch dont Vampire. Les lithographies d'Odilon Rodon marquent également le paysage des artistes d'un art qui joue sur l'étrange, le symbolique et les visions d'effroi. Les thèmes représentés sont en réalité liés, pour ces artistes, aux angoisses contemporaines. Le thème de la mort et d'une inquiétante étrangeté se révèle aussi dans l'oeuvre de Bonnard. Le paysage urbain est propice à une certaine peur de la nuit pour Spilliaert.

La dernière partie de l'exposition est consacrée au surréalisme. Les oeuvres de Klee sont nombreuses : On peut contempler ses paysages de forêts sombres et imaginaires. Dans un autre registre, l'art de Bellmer montre une certaine façon de déstructurer le corps. Le côté noir chez les surréalistes relèvent plus d'une étrangeté mettant en avant des scènes impossibles. Ces artistes explorent des techniques permettant de faire naitre l'imaginaire dans la représentation. Ils se sentent libres d'explorer des champs inconnus tout comme l'avaient précédemment fait les premiers peintres romantiques.

L'exposition L'ange du bizarre est une véritable exploration visuelle et sonore du développement de l'imaginaire sombre, d'une nouvelle liberté prise dans les sujets les plus difficiles à aborder et parfois à regarder. On peut découvrir comment le romantisme noir a pu traverser les époques et les mouvements artistiques. Nous sommes pris tout au long du parcours dans une tourmente d'oeuvres à la fois fantastiques, noires et somptueuses. Elles semblent à la fois nous attirer et nous repousser. Nous ressortons de l'exposition comme dans un rêve à la fois de cauchemar et de réalité.

L'ange du bizarre, le romantisme noir, une exposition à découvrir jusqu'au 23 juin

au Musée d'Orsay, Paris