Valentina Canseco, Laurent Gongora, Barbara Portailler, Fergus Sindal, Aurélie Slonina, Taylor Smith
Jardin du 6b, Saint-Denis
16 septembre – 15 octobre 2021
Julia Dupont s’attache à capter la lumière qui caresse l’architecture et observe avec attention les éléments qui attirent son regard durant ses explorations de paysages et d’espaces chargés d’histoire.
Elle mène deux séries photographiques en parallèle pour lesquelles elle construit un processus de travail dans le temps et suivant les lieux qu’elle parcourt. Ses sujets de recherches se situent essentiellement entre deux pays, la France et le Portugal. Ses photographies interagissent subtilement avec l’atmosphère et les volumes de l’Espace Regards.
Les images de la série Surfaces Profondes répondent aux lignes présentes au sol ainsi qu’aux cadres des fenêtres qui ponctuent la première salle de l’Espace Regards, ce qui induit une mise en abîme des lignes de lumière qui traversent les surfaces photographiées. Les rayons lumineux créent des passages, des présences immatérielles. Ils effleurent les murs, se posant directement sur les parois tout en laissant songer à des hors-champs. L’abstraction n’est pas si loin. Ces ouvertures nous conduisent vers des espaces pour des voyages proches du rêve.
Julia Dupont développe des images minimales invitant à songer à des souvenirs de perceptions d’architectures. Ses rencontres spontanées avec des lieux éclairés l’incitent à s’arrêter et à préserver ces tracés lumineux, signes du temps. Ses photographies suggèrent alors un léger mouvement comme si un souffle, un halo éclairait un espace traversé.
Dans ses deux projets actuels, elle s’attache à capter la lumière qui frôle l’architecture, les objets ou les rochers, observant finement la rotation du soleil sur des axes différents et dans les deux territoires où elle puise son inspiration.
Dans sa deuxième série, Geometrias do Ó, l’artiste est également à l’affût d’objets et de surfaces circulaires symbolisant l’origine et compose des associations entre elles. Elle effectue des allers-retours entre son approche photographique des environnements, des détails architecturaux, et son observation des objets.
D’une part, elle explore le territoire de Fontainebleau-Avon et ses environs à travers la marche, là où elle vit. Dans ce paysage patrimonial, elle poursuit l’histoire d’une communauté d’artistes pluridisciplinaires qui s’y sont installés depuis le XIXe siècle pour travailler en forêt et représenter la nature.
En approfondissant sa sensibilité pour les roches, « état primordial de l’architecture », elle ouvre sa réflexion sur la mémoire de la forêt de Fontainebleau et développe une recherche photographique avec un regard proche de celui du géologue ou de l’archéologue. Son intérêt pour les traces du temps, les pierres, la nature et l’architecture, l’amène à des situations d’attente, d’aller-retour de son lieu de vie à la forêt où elle repère des éléments qui l’intriguent. Ses images naissent de rencontres, de situations où dans lesquelles plusieurs phénomènes naturels doivent être présents simultanément.
Elle y glisse aussi des images de lieux parcourus entre deux régions, deux pays, travaillant à la lumière d’été au Portugal et à la lumière de l’hiver à Fontainebleau. Certaines photographies laissent deviner des détails d’architectures historiques, d’autres nous convient à prêter attention aux éléments naturels, qui deviennent précieux par l’attention qu’on leur porte.
Dans l’espace voûté de la cave, baigné d’une douce luminosité, ses fragments de lieux ou d’objets ainsi rassemblés nous font songer à des récurrences entre motif architectural ou figure géométrique. Symboles de l’infini et de la perfection, ces ronds trouvés dans la nature ou dans l’architecture, « sculptures naturelles » entre culturel et artificiel, renvoient à des tensions riches en mystère. Ils composent un cabinet de curiosités, lieu où art et science se côtoient.
Retour à l’étage baigné d’une lumière douce, celle du jour, les lignes de l’architecture dans les photographies deviennent vaporeuses. Les images de Julia Dupont tendent vers un certain minimalisme, « une picturalité » qui rappellent des souvenirs de contacts avec la lumière et avec différentes constructions dans plusieurs pays, chargés de mystères. Angles et obliques nous font perdre nos repères spatiaux. Des lignes rigides se transforment en vapeur de lumière d’un blanc éclatant, dessinant un espace infini qui s’offre à nous.
Nourries par La Poétique de l’espace ou La Terre ou les rêveries de la volonté du philosophe Gaston Bachelard, ses deux séries jouent sur un équilibre et des correspondances entre les images captées au fil des errances de l’artiste dans différents territoires.
Pauline Lisowski, août 2021.