Métamorphoses du quotidien : une exposition collective pour nous offrir un moment d’émerveillement

L’exposition « Métamorphoses du quotidien » nous dévoile à nouveau les univers enchanteurs de nombreux artistes. À la Maison des arts plastiques Rosa Bonheur, grâce au regard fin et subtile de Fabienne Leloup, directrice du lieu, les œuvres disséminées à l’étage ouvrent chacune vers une histoire, un conte, ou bien un souvenir parfois lié à la nature. L’espace se découvre comme un grenier dans lequel le regard se laisse attirer par des formes, des couleurs et des matières.

Marie Denis a été invitée à collaborer à ce récit en proposant des créations nouvelles et d’autres plus anciennes qu’elle a réagencé pour l’occasion. Ses végétaux précieusement récoltés composent ici des installations qui renvoient à différents savoir-faire, le tressage, la fabrication de bouquets et fait appel à des moments de cueillettes et de promenades. Le temps du végétal est au cœur de son travail. Elle évoque la fragilité de la nature, intranquille et créé des fossilisations de celle-ci. L’artiste qui a pu bénéficier des locaux pour composer un atelier d’estampes, de patine de matières et de végétaux a également laissé une trace de ses expérimentations au sein de l’exposition.

Nicolas Tourte, à partir d’une fenêtre, a composé une structure pour observer le soleil et se laisser porter par une boucle vidéo. Cet observatoire nous amène à faire un pas de côté pour passer de la vision de l’extérieur vers celle d’une potentielle éclipse virtuelle. Dans les interstices des poutres, Julie Legrand a fait naître des gouttes de verre qui poussent et rendent vivante l’architecture. D’autres œuvres brillent, bullent transformant les objets et mobiliers. À partir de matières, de planches de mica gravées, de porcelaine, polystyrène, Laurence Nicola a composé un paysage de petites formes qui rappelle l’envie de collectionner et de prendre soin des éléments que l’on recueille. Elle nous conduit à prêter attention aux toutes petites choses. Ces fragments de matériaux font apparaître un monde lointain dans une série de diapositives.

Nous sommes conviés à parcourir l’espace avec un œil ouvert et une grande curiosité pour découvrir les détails de certaines œuvres qui nécessitent qu’on s’approche pour percer leur mystère. Des échos se créent entre les dessins, sculptures et installations qui composent cette exposition. Il est question de cabanes, où se cacher, écho aux histoires populaires, entre merveilleux et cauchemar chez Katia Bourdarel, de châteaux pour se raconter des contes de fées chez Laure Tixier. L’habitat devient magique et inspire à nos jeux d’enfant. Il est aussi métaphore des manières dont l’homme construit son lieu de vie.

Chimère emplumée d’Amandine Gollé se rapproche d’une pièce de cabinet de curiosité. Les ailes de sa sculpture se développent également dans l'ensemble de dessins Plumes et Rémiges de Laurence Gossart. Elle a pris soin d’observer ces éléments délicats, témoins de songes et les présente comme des planches de représentation scientifique dans une boîte en bois. L’observation des éléments et des images invite à s’étonner et à rêver. Les matières et les paysages se transforment et composent un monde où vagabonder son esprit et se détacher du réel pour un moment.

Les œuvres d’Eloïse van der Heyden font écho à une forêt des surprises. Sa robe réalisée à partir d’empreintes et ses céramiques renvoient aux mythes présents dans ces lieux et aux relations de l’homme envers la nature. Il y a dans les dessins verticaux d’Hélène Muheim un attachement au paysage de la racine vers le ciel où chaque être vivant est représenté avec finesse entre apparition et surgissement. À ses côtés, la canne fleur, composée de métal, caoutchouc, clous, agrafes et punaises d’Eudes Menichetti renvoie à une relique des temps anciens, une sculpture qui fait référence à un objet religieux, ou bien à une parure baroque.

Chaque œuvre est chargée de poésie, de mémoire d’une attention à la nature, aux objets, au rythme des saisons. Entre deux états, la sculpture en matériaux de rebuts de Lionel Sabatté renvoie au caractère éphémère de la nature et évoque une renaissance. Les pièces de Laurent Pernot qui ponctuent l’espace nous incitent à méditer et célèbrent le monde fragile. La sculpture de Carolein Smit semble surgir d’un récit mythologique. L’animal sollicite à la fois attraction et répulsion.
Les figures des aquarelles de Luc Doerflinger présentent des dualités en suspens, où animalité et humanité, enchantement et désenchantement se rejoignent. La réflexion sur l’image et ses significations se retrouve dans la série de dessins Naturarium d’Yves Helbert qui montrent la nature comme création de l’homme.

Au fond de l’espace, De l’intérieur, un miroir gravé d’Angèle Guerre conduit vers une traversée vers un ailleurs lointain. De l’installation à l’échelle de l’architecture à l’œuvre qui nécessite qu’on s’approche, la sculpture cinétique de Laurent Debraux attire notre attention et sollicite notre questionnement quant à son mécanisme.

Maylis Turtaut propose l’installation Sakura, des pétales de porcelaine qui au départ dessinaient la forme d’un végétal auprès d’un arbre. Les mois passent et ces précieux éléments furent ramassés et disposés avec soin dans l’espace d’exposition.

Les œuvres nous captivent par leur capacité de modifier notre perception du réel. Les objets de notre quotidien se métamorphosent et la contemplation conduit à l’admiration. Cette exposition invite à redécouvrir notre quotidien et à basculer notre regard de la réalité vers un univers mystérieux. Le végétal, l’animal, l’architecture et le mobilier sont associées, transformées et nous amènent à raviver nos sens et à maintenir notre regard en éveil. Elle nous offre un moment suspendu pour aborder avec plus de douceur notre monde.

Pauline Lisowski

Une exposition à découvrir jusqu'au 3 octobre à la Maison des Arts Plastiques Rosa Bonheur, Chevilly-Larue.

Île #3, ciment, bonsaï, ongles et peaux mortes, 55 x 47 x 23 cm, 2019 de Lionel Sabatté, crédit photo : Alex Bonnemaison

Île #3, ciment, bonsaï, ongles et peaux mortes, 55 x 47 x 23 cm, 2019 de Lionel Sabatté, crédit photo : Alex Bonnemaison

sculpture de Julie Legrand, verre, 2020, crédit photo : Alex Bonnemaison

sculpture de Julie Legrand, verre, 2020, crédit photo : Alex Bonnemaison

Installation de Marie Denis, crédit photo : Alex Bonnemaison

Installation de Marie Denis, crédit photo : Alex Bonnemaison

Série Naturarium, dessins au graphite, 30 x 40 cm, 2018 d'Yves Helbert, crédit photo : Alex Bonnemaison

Série Naturarium, dessins au graphite, 30 x 40 cm, 2018 d'Yves Helbert, crédit photo : Alex Bonnemaison

Plaid houses, feutre, 30 x 30 x 30 cm, 2007-2011 de Laure Tixier, crédit photo : Alex Bonnemaison

Plaid houses, feutre, 30 x 30 x 30 cm, 2007-2011 de Laure Tixier, crédit photo : Alex Bonnemaison

Ça et là Mica, pocelaine, éléments naturels, polystyrène, gravure sur mica dimensions variables, 2020 de Laurence Nicola, crédit photo : Alex Bonnemaison

Ça et là Mica, pocelaine, éléments naturels, polystyrène, gravure sur mica dimensions variables, 2020 de Laurence Nicola, crédit photo : Alex Bonnemaison