Quel travail ?! Manières de faire, manières de voir, une exposition collective au Centre photographique d’Ile-de-France, Pontault-Combault (77)



Quel travail ?! Manières de faire, manières de voir, une exposition collective au Centre photographique d'Ile-de-France, Pontault-Combault (77)

L'exposition Quel travail ?! Manières de faire, manières de voir réunie quatorze artistes autour de la thématique du travail. Les photographies, vidéos et installations révèlent une façon de voir le travail. Travail à l'arrêt, fin du travail, épuisement au travail, individus au travail et gestes de travail sont mis en scène dans cette exposition. Les artistes d'horizons divers, émergents ou bien connus sur la scène contemporaine se sont interrogés sur les changements et les permanences de la place de l'homme dans le monde du travail. Ils montrent que les médiums artistiques sont devenus propres à montrer comment le travail est aujourd'hui perçu dans le monde. Des artistes ont d'ailleurs porté leur réflexion sur leur propre travail artistique.

Dans la grande salle de l'ancienne ferme qui est devenue le centre photographique d'Ile-de-France, les deux installations d'Antoine Nessi ont pris leur place. Les outils morts et les Ghost Machines sont des outils sculptés qui rappellent la fin du travail, la mort de l'usine. Aux murs, les photographies évoquent pour certaines des revendications de travailleurs, la fin du travail et d'autres dévoilent l'individu à l’œuvre. La série Campaign for Braddock Hospital de LaToya Ruby Frazier est une œuvre manifeste de l'engagement de l'artiste. Celle-ci a cherché à faire revivre sa ville natale en proposant une œuvre mêlant photographies, vidéos, actions et tracts. Les deux photographies de Jesus Alberto Benitez sont plus conceptuelles. L'artiste s'intéresse à la photographie en tant qu'image à part entière. Pour lui, elle entre dans un processus de travail de plis, de transformations et de mises en abîme. Gilles Saussier est retourné sur les lieux de production de la colonne sans fin de Constantin Brancusi. Sa série Sinea dévoile la fabrication de l’œuvre du sculpteur et la mémoire d'une usine. Caroline Bach a développé une série de photographies sur Bataville, la ville de Lorraine où se situe l'usine Bata qui a fermé ses portes en 2001. L'artiste témoigne alors d'un lieu désert, sans vie où tout travail s'est arrêté. Allan Sekula a une réflexion plus critique sur le système capitaliste dans ses photographies. Claire Chevrier a étudié la relation entre le corps humain et l'espace de travail. Les photographies exposées sont issues de son projet mené lors de sa résidence à Douchy-les-Mines en 2010. Bruno Serralongue s'est également intéressé à une région industrielle, la Lorraine. Sa série Florange 2011-(en cours) documente les manifestations des ouvriers de l'usine ArcelorMittal. Il monte également l'envers du décor de la région. Les photographies nous livrent directement les événements sous un angle frontal et leur cadrages révèlent la beauté que peut suggérer l'architecture des sites industriels. Sous une autre forme, Manoeuvres de Suzanne Lafont met en scène une série de 24 tableaux. Des images du lent défilé de bateaux sur la ligne d'horizon des jetées du port et des images de figures humaines sont articulées et suggèrent le scénario répété d'une attente du travail.

Une dernière série de photographies se découvre dans un corridor : Olivia Gray a porté son attention sur les dentellières de Calais. Ses portraits dévoilent le corps féminin au travail, des femmes à la fois tristes et héroïques.

Au sol, on peut voir la série de vidéos de portraits d'artistes d'Ilanit Illouz. Cette jeune artiste a filmé des artistes sur leur lieux de travail. On ne voit que le sol et certains gestes de travail. Par ce cadrage insolite, l'artiste a capturé les sons, les gestes et silences des artistes. Nous pouvons ainsi imaginer une possible fiction en voyant les images captées par la caméra. Underway, figure 2 est une pièce qui semble à première vue très singulière. C'est en fait une pièce produite par Laëtitita Badaut Haussmann, initialement pour une exposition. On peut la considérer comme une sculpture en attente d'être activée.

Dans une salle, sont également projetées en alternance deux vidéos. L'une est de Julien Prévieux, l'autre de Laëtitia Badaut Haussmann. La vidéo d'Ali Kazma résonne elle, dans l'espace d'exposition et nous incite à la découvrir. L'artiste a filmé une usine de voitures où gestes et mécanismes des machines sont montrés dans les détails. Son film dévoile en rythme le travail de la machine par un jeu de plans rapprochés puis éloignés en continue.

A remarquer également l'installation vidéo de Julien Prévieux. Le dispositif présente une "archive de gestes à venir". Le film d'animation projeté grâce à un système archaïque peut évoquer un travail passé et à venir.

Cette exposition nous montre comment les artistes ont été à la fois acteurs et observateurs du monde du travail. L'ensemble des œuvres nous incite à réfléchir sur notre propre condition humaine et sur la relation que nous entretenons avec notre propre travail. La mémoire du travail et des sites industriels est présente dans certaines. La photographie et la vidéo nous dévoilent un monde du travail passé, à venir et à préserver.

Quel travail ?! Manières de faire, manières de voir, à voir absolument jusqu'au 30 juin

au Centre photographique d'Ile-de-France, Pontault-Combault (77)