Constellations fertiles

Julie Boileau, Gabriela Larrea Almeida, Stephanie Olivar, Carine Valette, Clémence Vazard

Le Consulat Voltaire, Paris

Du 03 avril au 06 avril 2025

Les artistes se rencontrent autour de pensées écoféministes, de liens à la terre, de pratiques engagées. En faisant corps collectif, elles libèrent des paroles et nous entrainent dans un processus de coopération, de relations et de réparation. Leurs pratiques résonnent à l’image de ramifications, d’un cheminement d’un territoire à un autre. Leurs processus de création relèvent d’un attachement à des écosystèmes, à des rencontres, à la compréhension du monde végétal. Le temps long à l’œuvre, l’observation de ce qui se présente et l’accueil de leurs sensations les amènent à s’ancrer et à se connecter au vivant.

La transmission des gestes de femmes, de génération en génération se révèle dans leurs travaux : une manière de cultiver ces liens féconds et de préserver des savoir-faire de ces grands-mères, ces mères, ces brodeuses, ces jardinières et guérisseuses, dont la douceur est puissance et qui portent en elles les secrets qu’elles livrent à celles qui sauront les respecter. Les souvenirs familiaux croisent des mémoires collectives. 

Leurs œuvres tendent vers l’écoute et le soin de l’autre, humain et non-humain. Elles invitent à nous reconnecter au vivant en dessinant de nouveaux imaginaires où côtoyer avec empathie d’autres formes de vie et restaurer des connexions fertiles avec des plantes porteuses d’un renouveau. 

Chacune voue un attachement à un territoire et accueille ce qui se présente comme un précieux présent. Leurs déplacements en différents lieux nourrissent leurs gestes et leur engagement artistique au quotidien. À nous d’emprunter ces différents chemins qui poussent à agir, à s’investir et à respecter les écosystèmes.

Face au vivant, entre le bassin d’Arcachon et le Chili, Carine Valette laisse son geste traduire ses émotions. Ses gravures montrant des éléments naturels l’amènent à restaurer une énergie, une certaine douceur dans un moment de contemplation. D’autres travaux plus récents restituent son attention au désert d’Atacama et suggèrent une forme de réconciliation du politique et du spirituel. Utilisant des supports chargés de mémoire, l’artiste et poétesse convoque sa propre histoire personnelle et nous incite à célébrer la vie.

Clémence Vazard se laisse imprégner des lieux où elle part en résidence. Ses œuvres restituent des moments d’écoute et d’apprentissage des vertus des plantes qu’elle acquiert auprès des femmes qu’elle rencontre, notamment au Mexique, pays qui lui est devenu cher. Employant la teinture végétale, elle laisse les plantes s’exprimer, préserve la diversité de leurs nuances et fait confiance au processus à l’œuvre.

L’expérience de vivre à proximité de la forêt guyanaise amène Julie Boileau à aiguiser son regard face à un foisonnement de végétation. Une photographie nous plonge dans cette forêt de lianes, tandis que d’autres œuvres nous invitent à rencontrer de curieuses présences, tels des gardiens et protecteurs des plantes. Ce milieu l’inspire également à passer du temps, à s’émerveiller, à prêter attention au cycle de transformation du vivant. Ses œuvres condensent l’énergie du végétal et ouvrent vers d’autres formes de vie.

Par la pratique du cyanotype associé à un travail de broderie, Gabriela Larrea Almeida se reconnecte avec l’héritage de sa grand-mère équatorienne qu’elle a toujours vu crocheter. Son travail autour des tresses fait référence à une tradition propre à la culture amérindienne du pays dont elle est originaire. Ses photographies jouent sur une fusion entre corps et végétal. Elles témoignent d’une sensation de bien-être, d’un nouveau souffle, au contact d’éléments naturels.

Stéphanie Olivar considère les liens et similitudes entre les formes végétales et l’intérieur du corps humain : des mondes fragiles et précieux dont il faut prendre soin. Originaire du Maroc, elle tend à préserver une pratique ancestrale de broderie d’art français, dans une filiation avec sa grand-mère, couturière pour la Haute Couture. Ses œuvres composent de nouvelles topographies, des lieux refuges, où se régénérer, restaurer des connexions avec ses propres racines et celles des arbres, avec et grâce aux éléments naturels (mer, terre, arbre).

Au-delà de récits personnels auxquels tout à chacune, chacun peut se relier, les artistes proposent ici un monde de relations fluides, porteuses d’espoir. 

Pauline Lisowski