Félix Pinquier développe une démarche artistique basée sur une recherche constante : Il pense son travail comme une œuvre ouverte ; chaque pièce est réactivée en fonction des lieux d'exposition. Le centre d'art contemporain La Traverse lui a permis de développer ce "work in progress". Lors de sa résidence, il a poursuivi certains projets et a exploré d'autres matériaux pour créer de nouvelles sculptures.
Il a organisé son exposition en composant des espaces propices au dialogue entre ses œuvres. De différentes époques de création, elles invitent le spectateur à imaginer des liens possibles. D'une salle à une autre se crée une continuité, un parcours rythmé par des objets évocateurs de mouvements et de sons.
Fasciné par l’idée de synesthésie, ce phénomène neurologique par lequel plusieurs sens sont associés, Félix Pinquier invente des objets qui impliquent un travail mental. Ses sculptures se révèlent être des énigmes pour le spectateur. Des analogies ambiguës entre ce qu'on voit et les sensations qu'on peut éprouver se créent. Par leur forme, ses objets silencieux ont la particularité de représenter le son. Ils incarnent l'arrêt du mouvement.
Dans la première salle, Station peut suggérer à la fois le soufflet d'un accordéon et le pavillon d'une trompette. À ces sculptures répondent ses dessins. Sur certains, des formes combinées font écho à des dirigeables. D'autres tels que la série Formes-rythme-points peuvent être vus comme des partitions. L'artiste explore les capacités évocatrices des formes et des couleurs. Le jaune est, avec le vert acide, la seule couleur présente dans l'ensemble de ses œuvres. En aplat, ou dans les couches de matière, la couleur fait vibrer les sculptures. Elle captive le spectateur et le visible ouvre notre esprit vers le sonore. Horn attire ainsi le visiteur.
Certaines pièces font écho à l'univers des machines, comme Plateforme : des objets sont disposés tels de possibles instruments silencieux. Plus qu'un socle, elle compose un nouvel espace. Si l'artiste ne cherche pas à représenter le son, il construit un paysage de volumes, où le son qu'ils pourraient diffuser est comme arrêté. Il s'intéresse particulièrement au travail de la matière ; l'aspect de chaque sculpture fait ressortir un long processus de transformation. Inscrites subtilement dans l'espace, ses œuvres évoquent ainsi la diffusion du son et sa résonance.
Félix Pinquier a fait de sa résidence un long procédé de métamorphose de l'espace : il en a compris ses atouts et contraintes. Si les œuvres ne livrent pas directement leur sens, elles obligent le spectateur à faire l'effort de les laisser muettes. Son exposition semble alors ouverte à un nouveau chantier possible, à un déplacement.
Félix Pinquier : L'effet B/K, une exposition à découvrir jusqu'au 4 avril
au Centre d'art contemporain La Traverse, Alfortville (94)
Crédit photo : Pauline Lisowski